Achab et Josaphat – L’esprit de mensonge
Daniel Orchanian | Vie chrétienne
Lorsqu’on aborde les textes historiques de l’Ancien Testament, il nous arrive d’adopter deux attitudes qui peuvent fausser notre compréhension du texte, et son application dans nos vies. La première consiste à considérer le texte comme un simple ensemble de faits historiques parfois barbants, qui ne parlent pas vraiment aux chrétiens de notre siècle. La seconde, au contraire, nous fait voir des leçons dans chaque détail d’un texte qui n’a pas été écrit pour cela au départ.
Il faut distinguer ce qui relève du narratif de ce qui est le commandement. On peut tirer des leçons de ce qui est narré, mais cela n’est pas toujours un commandement à appliquer. Il peut s’agir d’une information concernant Dieu, une prophétie sur le Messie, une description des conséquences du péché, etc...
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Le texte qui va nous occuper ici est doublement présent dans la Bible. L’histoire qu’il décrit se trouve à la fois dans le livre des Rois (1 Rois 22.1-36) et dans celui des Chroniques (2 Chroniques 18). Les différences entre les deux textes sont minimes (notamment un détail concernant un banquet en début de chapitre, et une précision sur l’intervention divine). Les versets cités seront identiques dans les deux passages. Si je vous indique les deux références, c’est parce que les deux livres dont elles sont issues donnent deux points de vues complémentaires sur le contexte de l’histoire. L’histoire elle-même est relatée à l’identique.
Le contexte historique
Après la mort de Salomon, Fils de David, Dieu divise le royaume d’Israël en deux : au nord, le royaume d’Israël et au sud, celui de Juda. Les années passent, et si à Juda, la lignée de David subsiste, au nord les rois se succèdent dans le meurtre et mènent leur peuple progressivement plus loin dans le péché.
Les deux royaumes, en concurrence sur de nombreux points, vivent une période de paix sous le règne de Josaphat, roi de Juda. Au nord, quelques années auparavant, Achab, roi d’Israël, affronte le roi de Syrie. Dieu lui livre ce roi, mais Achab lui désobéit en l’épargnant pour en faire son allié.
En échange, le roi de Syrie lui promet de restituer les villes conquises à Israël. Or, trois ans ont passé et apparemment, le roi de Syrie n’a pas tenu sa promesse. Achab décide de partir en guerre pour reprendre la ville de Ramoth.
Lors d’une visite diplomatique de Josaphat, roi de Juda, Achab le convainc de se joindre à lui. C’est ici que notre histoire commence.
Un texte plein de contrastes
Si vous n’avez pas encore lu les textes cités en début de cette page, je vous suggère de le faire maintenant.
Souvent, la Bible oppose deux choses, ou deux individus, pour nous montrer la voie à suivre et celle à éviter. On trouve ce procédé surtout dans le livre des Proverbes ou dans les paraboles de Jésus.
Ici, le texte opère un contraste explicite, évident, entre les 400 prophètes d’Achab et le prophète Michée, mais aussi un contraste implicite entre les deux rois Achab et Josaphat.
- Achab, roi d’Israël, est décrit de façon peu reluisante dans la Bible. Le livre des Rois lui consacre une large portion où il est désigné comme le pire roi ayant régné sur Israël (1 Rois 16.30).
La Bible le décrit comme idolâtre (il introduit des cultes étrangers en plus des idoles du pays), meurtrier (1 Rois 21) et constamment désobéissant à Dieu, même lorsqu’il le voit à l’œuvre. Par son comportement, il apporte le malheur sur son pays (des années sans pluie) et l’injustice. - Josaphat est décrit comme un bon roi, qui a été fidèle à Dieu durant sa vie (1 Rois 22.43). Cependant, il lui sera reproché d’avoir créé des liens avec Achab (2 Chroniques 19.1-3) et de s’être laissé entraîner dans ses activités.
Des prophéties contradictoires
Ce texte qui nous relate les préparatifs d’une bataille, nous livre d’incroyables révélations sur le processus très délicat et pourtant très contemporain qu’est la prophétie.
On y voit 400 prophètes prédire la victoire pour Achab et la pression exercée sur Michée pour qu’il aille dans le même sens (1 Rois 22.13-14).
On voit qu’Achab n’aime pas le prophète Michée parce qu’il ne lui annonce jamais rien de bon, mais toujours du mal. Ce reproche de pessimisme se retrouve à plusieurs reprises dans la vie des prophètes. Jérémie a subi une situation similaire dans sa vie, le peuple préférant écouter des prophètes plus rassurants. Je m’avancerai jusqu’à dire qu’il existe encore de nos jours une philosophie qui cherche à éliminer tout ce qui est négatif de l’Évangile.
Mais comment des prophètes en arrivent-ils à donner de fausses prophéties ? Sont-ils convaincus de ce qu’ils annoncent, ou mentent-ils effrontément ? Peut-on sincèrement proférer des mensonges au nom de Dieu ? La Bible nous indique que c’est le cas.
Un esprit de mensonge
Mais Michée continua :
– Eh bien, oui. Écoute ce que dit l’Éternel ! J’ai vu l’Éternel siégeant sur son trône, tandis que toute l’armée des êtres célestes se tenait près de lui, à sa droite et à sa gauche.
l’Éternel demanda : « Qui trompera Achab pour qu’il aille attaquer Ramoth en Galaad et qu’il tombe sur le champ de bataille ? » L’un proposait ceci, l’autre cela.
Finalement, un esprit s’avança, se plaça devant l’Éternel et dit: « Moi, je le tromperai. » l’Éternel lui demanda: « Et comment t’y prendras-tu ? »
« J’irai, répondit-il, inspirer des mensonges à tous ses prophètes. » l’Éternel dit : « Pour sûr, tu le tromperas, tu y réussiras. Va donc et fais comme tu l’as dit. »
Et maintenant, conclut Michée, c’est ce qui est arrivé: l’Éternel a fait qu’un esprit de mensonge inspire tous tes prophètes ici présents, car l’Éternel a résolu ta perte.
Avant de donner des conclusions sur ce passage, j’aimerais préciser certaines choses.
- L’esprit de mensonge ici n’est pas clairement identifié comme tel, mais tout laisse à penser que c’est le diable, ou un de ses représentants. Les mots pour sûr semblent indiquer que celui qui se présente devant Dieu est un expert en mensonge (Jean 8.44). Le livre de Job nous montre par ailleurs que Satan a ses entrées auprès de Dieu.
- Dieu ne joue pas avec les gens. Si en lisant ce passage, vous avez l’impression que Dieu manipule les prophètes, vous avez raison. Par contre, ne pensez pas que c’est contre leur volonté. La Bible montre que Dieu a le contrôle sur le mal, et qu’il peut décider de le stopper ou de le laisser agir, parfois pour qu’il en ressorte du bien (l’esclavage de Joseph en Égypte), ou parfois en conséquence du péché des hommes (le mauvais esprit qui tourmentait Saül n’est venu qu’après sa désobéissance). Dieu ne ment pas. Il livre à Satan ceux qui préfèrent écouter le mensonge.
Ces précisions faites, j’aimerais que vous notiez l’existence de cet esprit de mensonge. Beaucoup de choses que de nos jours, nous pouvons attribuer au Saint-Esprit, viennent d’un esprit de mensonge.
Pour ceux qui objecteraient à ce sujet, en disant que cela n’est qu’une image, je vous renvoie au début de la prophétie de Michée, quand il voit les troupes d’Israël dispersées et sans roi : s’agissait-il d’une image ?
De plus, si vous pensez que tout ceci était ponctuel et ne s’appliquait qu’à cette situation donnée, je vous exhorte à lire le verset 28 : Écoutez, vous tous les peuples !
Si vous n’êtes toujours pas convaincu, voici quelques versets qui traitent du même thème.
1 Timothée 4.1 : Cependant, l’Esprit déclare clairement que, dans les derniers temps, plusieurs se détourneront de la foi parce qu’ils s’attacheront à des esprits trompeurs et à des enseignements inspirés par des démons.
2 Pierre 2.1 : Autrefois, il y a eu des prophètes de mensonge parmi le peuple d’Israël; il en sera de même parmi vous. Ces enseignants de mensonge introduiront subtilement parmi vous des erreurs qui mènent à la perdition. Ils renieront le Maître qui les a rachetés et attireront ainsi sur eux une perdition soudaine.
De quoi nous préoccuper
Le passage qui suit nous donne une conduite à adopter vis-à-vis de tout esprit.
1 Jean 4.1 : Mais attention, mes chers amis, ne vous fiez pas à n’importe quel esprit; mettez les esprits à l’épreuve pour voir s’ils viennent de Dieu, car bien des prophètes de mensonge se sont répandus à travers le monde.
Comment mettons-nous un esprit à l’épreuve ? À l’épreuve de quoi exactement ? En aucun cas ce n’est à l’épreuve de notre conscience (Jérémie 17.9). À l’épreuve du Saint-Esprit ? C’est justement le problème ici. C’est vers la Parole de Dieu qu’il faut se tourner (2 Timothée 3.16, Jérémie 23.18).
Malheureusement, alors que nous sommes censés recevoir la Parole et mettre tout esprit à l’épreuve, beaucoup de chrétiens aujourd’hui reçoivent tout esprit et mettent la Parole de Dieu à l’épreuve.
Comme Josaphat, vous tournez-vous vers l’Éternel et sa Parole avant d’agir (1 Rois 22.5) ?
Recherchez-vous vraiment sa volonté, même lorsque 400 avis unanimes vous prédisent le succès ?
Êtes-vous humble et respectueux face à sa Parole (1 Rois 22.8) ?
De quoi nous inquiéter...
Les faux prophètes font peur. Aujourd’hui, alors que les mouvements et les philosophies se multiplient, et qu’il devient difficile de distinguer la voix de Dieu au milieu de cette vaste cacophonie, on pense parfois que les faux prophètes peuvent perdre définitivement ceux qui croient en Dieu. On pourrait même penser que les faux prophètes sont victimes de l’esprit de mensonge, et ceux qui les écoutent aussi.
Pourtant, la vie d’Achab et la réaction du prophète Sédécias au verset 24 montrent que ces hommes ne suivaient pas Dieu. Il sont indéfendables.
2 Timothée 4.3-4 : Car le temps viendra où les hommes ne voudront plus rien savoir de l’enseignement authentique. Au gré de leurs propres désirs, ils se choisiront une foule de maîtres à qui ils ne demanderont que de leur caresser agréablement les oreilles.
Ils détourneront l’oreille de la vérité pour écouter des récits de pure invention.
Jérémie 23.16-18 nous confirme que les révélations que reçoivent ces faux prophètes viennent de leur cœur, et non de la bouche de Dieu, sa Parole.
Jérémie 23.17-18 : À ceux qui me méprisent ils disent :
L’Éternel a parlé,
vous connaîtrez la paix.
Et à tous ceux qui se comportent selon les penchants de leur cœur
ils disent : Le malheur ne vous atteindra pas !
Mais qui a assisté au conseil que tient l’Éternel ?
Oui, qui a vu, qui a entendu sa parole ?
Qui donc a prêté attention à sa parole ?
Qui donc l’a entendue ?
Mais surtout, ce passage nous parle de ceux qui les écoutent. Ce sont ceux qui méprisent Dieu. Ce sont ceux qui se comportent selon les penchants de leur cœur, et qui ne prêtent pas attention à sa parole. À ceux-là, il leur est « promis » paix et sécurité.
Les faux enseignements sont une conséquence d’un égarement que l’on choisit, quand on s’entoure de ce qui arrange, et quand on recherche autre chose que Dieu. Les faux prophètes sont la punition de ceux qui se détournent de Dieu.
Faites-vous comme Achab ? Avez-vous l’ouïe sélective ? Sélectionnez-vous les paroles favorables en écartant ce qui vous dérange ? Êtes-vous à la recherche du succès, et du positif ? Ou même du spectacle (1 Rois 22.10-11) ?
Vous déguisez-vous pour échapper à la sentence, au jugement de Dieu (1 Rois 22.30) ?
De quoi nous rassurer
Dieu n’abandonne pas celui qu’il aime. Dans 2 Chroniques 19, quand Josaphat rentre en Juda après la bataille, il lui est reproché de s’être compromis avec Achab. Pourtant, cet écart n’a pas été sa perte.
Au cours de ladite bataille, tout indiquait que Josaphat devait mourir.
- Achab, qui a sans doute compris que sa fin arrivait, se déguise mais prend soin de laisser Josaphat en habits royaux.
- Dans 2 Chroniques 18.30-31, on voit que les troupes syriennes avaient pour ordre de ne pas se concentrer sur les soldats ou même les officiers, mais de concentrer toute l’attaque sur le roi d’Israël uniquement.
- Au moment où ils encerclent Josaphat, le seul roi apparent sur le champ de bataille (Achab s’étant déguisé), il pousse un cri, et les Syriens comprennent qu’il n’est pas Achab.
J’aimerais que vous réfléchissiez un moment : à cette époque, les gens n’avaient ni les journaux, ni une photo d’Achab. Ils n’avaient aucun moyen de reconnaître Achab sauf s’ils l’avaient déjà rencontré. Et au milieu d’une bataille, on n’a pas le temps de s’arrêter et de vérifier.
Le livre des Chroniques fait clairement mention d’une intervention de Dieu pour sauver Josaphat.
Ce qui nous rassure, c’est que Dieu contrôle tout. Il contrôle une armée entière pour que pas un seul soldat par erreur ne porte atteinte à celui qu’Il veut protéger.
Il contrôle la flèche tirée au hasard sur Achab pour que s’accomplisse Sa Parole.
Ce qui nous rassure, c’est que Dieu garde du mensonge celui qu’il aime. Même au milieu d’une multitude de faux prophètes, dans un royaume idolâtre, il nous fait parvenir sa Parole.
Ce qui nous rassure, c’est que Dieu n’est pas dans la majorité, même au sein de ceux qui se disent chrétiens. Si on se sent parfois seul sur la route étroite, on ne l’est jamais. Il nous garde et nous préserve de la chute, si toutefois nous nous tournons vers lui.
Conclusion
Êtes-vous encore comme Achab ? Alors l’Évangile est pour vous. Acceptez cette mauvaise nouvelle dure à avaler : vous êtes né dans le péché, et si rien ne change, vous mourrez dans le péché. Vous aurez beau vous convaincre et vous rassurer, la flèche vous atteindra un jour ou l’autre. La Parole de Dieu vous jugera.
Pour le moment, cette Parole peut vous sauver. Jésus a pris vos péchés, repentez-vous et détournez-vous du péché pour marcher sur ses traces. Sans repentance, vous vivez un mensonge.
Êtes-vous devenu comme Josaphat ? Alors l’Évangile est en vous. Vous appartenez à Dieu, et si sur cette Terre, ça n’a pas l’air glorieux, vous savez que tout cela passera, mais sa Parole ne passera pas (Matthieu 24.35).
Ne vous compromettez pas avec Achab, avec le péché, au risque d’y laisser quelque chose. Si cela arrive, Dieu, dans sa grâce, vous en sortira. Recherchez la Parole, laissez-vous continuellement enseigner par Dieu. Il vous gardera de tout, et pour toujours.